LA SÉPULTURE DE GONDOLE
Pour célébrer le chef de guerre gaulois, l'imagerie ancienne exhibe volontiers un cavalier moustachu monté sur une bête énorme, de la carrure des destriers médiévaux. Hélas ! La réalité minore bien souvent les images d'Epinal. Ainsi de la cavalerie gauloise. Celle-ci n'est certes pas imaginaire : elle fut même redoutable. Mais elle montait à poney.
C'est l'un des enseignements des découvertes de Gondole (Puy-de-Dôme) qui comptent parmi les plus saisissantes de la décennie écoulée. Huit hommes et huit équidés déposés en deux rangées dans une même fosse. Allongé sur le flanc, chaque homme a une main sur l'épaule de l'infortuné compagnon allongé devant lui. Quant aux montures, les marques que portent leurs membres ne laissent aucun doute : elles étaient soumises à rude épreuve et leurs cavaliers les ont sans doute menées au combat. Mais aucune d'elles ne toise plus de 1,30 mètre au garrot. Dans la terminologie moderne, ce sont donc des " doubles-poneys ". De ceux auxquels on confie sans crainte ses enfants le mercredi après-midi…
L'étrangeté de la découverte montre à quel point les Gaulois nous sont encore largement inconnus. Datée du Ier siècle av. J.-C., la sépulture collective de Gondole n'a pas d'équivalent. "Elle est tellement atypique que certains ont même brièvement pensé, lors de l'exhumation, à des vestiges de la première guerre mondiale !", raconte l'archéologue Vincent Charpentier, de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). Certains, minoritaires, refusent toujours d'y voir une tombe gauloise et pensent qu'il s'agit plus probablement de mercenaires germains, enrôlés par Rome outre-Rhin et tombés à la bataille de Gergovie en 52 av. J.-C., à seulement quelques kilomètres de là…
Comment savoir ? Aucune arme sur les hommes. Aucun harnachement sur leurs montures. Aucun indice des causes du décès. S'agit-il de cavaliers tombés au combat ? Est-on en présence de sacrifices humains ? César, dans La Guerre des Gaules, raconte que les "clients" – les vassaux, en quelque sorte – d'un noble guerrier gaulois doivent être mis à mort ou se suicider si leur maître vient à mourir de mort violente…
Depuis la découverte de la singulière sépulture, au printemps 2002, au pied du tertre de l'oppidum de Gondole, les archéologues ont continué leurs travaux. Tout à côté, des fouilles ont mis en évidence une intense activité artisanale centrée sur la fabrication de céramiques – de nombreux fours ont ainsi été mis au jour. Quant à l'oppidum lui-même, "les photographies aériennes y montrent une grande densité de structures", signale l'archéologue Ulysse Cabezuelo (Inrap), découvreur de la sépulture collective de Gondole. Mais, situé sur un terrain privé, l'endroit n'a pas encore été fouillé.
*note:
Dans la même region,5 autres tombes ont été mises à jour, elles contiennent chacune 6 à 10 animaux disposés méticuleusement mais il n'y a pas trace des cavaliers. La datation au carbone 14 indique que l'inhumation a eu lieu il y a environ deux millénaires (entre 160 av JC et 120 ap JC, comme pour la première découverte). Il s'agit de chevaux mâles (ils ont la canine qui manque aux juments) adultes. La cause de la mort reste énigmatique, il ne s'agit cependant pas d'une épizootie car l'enfouissement aurait été plus désordonné.